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Centres d’appels: Un secteur d’avenir… pour les patrons

Publié le par SUD TELEPERFORMANCE FRANCE

Face à la crise, le gouvernement semble vouloir miser sur les centres d’appels pour embaucher. Vieille technique… et jackpot pour les entreprises.

Les centres d’appels seront-ils les nouvelles « usines tournevis », largement subventionnées par l’État et les collectivités territoriales et prestement délocalisées une fois englouties les mannes publiques ?


Avec la crise, la désindustrialisation s’accélère dans un grand nombre de bassins et les destructions d’emplois se comptent par dizaines de milliers… Dans ce contexte, le gouvernement Fillon recherche les secteurs susceptibles de recruter par temps de récession. À travers la baisse de la TVA dans la restauration, les pouvoirs publics affirment encourager les recrutements, mais pour l’heure, les conséquences sociales de cette mesure emblématique risquent de faire attendre encore longtemps. Depuis quelques semaines, le gouvernement a choisi de mettre les centres d’appels au coeur de sa stratégie « volontariste » de création d’emplois. En une quinzaine d’années, le secteur de la « relation client », selon la terminologie managériale, a pris de l’importance (250 000 salariés en France), mais en termes de conditions de travail pénibles, de bas salaires et de non-reconnaissance des qualifications, sa réputation n’est plus à faire. En matière d’organisation du travail flexible, l’inventivité des directions paraît sans limites. Les investissements nécessaires à l’installation des centres d’appels sont extrêmement faibles et, qui plus est, souvent financés par des collectivités locales ou des grandes entreprises dans le cadre de plan de « reconversion » ou de « revitalisation du territoire » : les exemples d’implantation de plates-formes téléphoniques sur les décombres d’un site industriel sont nombreux, que l’on pense, par exemple, à Armatis dans l’ancienne usine LU à Calais ou, plus récemment, au projet deTeleperformance à la CAMIF de Niort… Autre caractéristique cruciale de ce secteur : les délocalisations d’activités vers les destinations à bas salaires et à législation sociale très peu protectrice sont bien engagées, et depuis de nombreuses années.


C’est pour tenter de contrecarrer cette mauvaise image de marque que, le 28 juillet dernier, le gouvernement, les fédérations patronales et trois syndicats (CFDT, CGC, CFTC) ont signé un « accord-cadre national pour le développement de l’emploi et des compétences dans la filière des centres de relation client ». « C’est un accord offensif qui correspond à un secteur orienté vers des perspectives d’emploi, se gargarise Laurent Wauquiez, secrétaire d’État à l’Emploi. Il représente une avancée sociale majeure pour un secteur d’activité dynamique, qui continue de recruter dans un environnement pourtant difficile, mais qui est confronté au défi de la professionnalisation de sa gestion des ressources humaines. » Selon les calculs des signataires de cet accord, le secteur des centres d’appels ne représente en France que 0,6 % de la population active, quand il culmine autour de 4 % en Grande-Bretagne et même de 6 % aux États-Unis. De quoi espérer, selon eux, créer 50 000 emplois (dont 1 500 avec des contrats aidés) sur les trois prochaines années. Dans un secteur où, à coup de rachats et de fusions, les grandes entreprises continuent de faire des profits mirobolants, le gouvernement a décidé d’octroyer 6,4 millions d’euros de fonds publics aux entreprises du secteur. Des financements européens sont également disponibles, a fait savoir Bercy. Le but affiché est d’« améliorer l’attractivité de la filière » et d’« accompagner les créations d’emplois ».


Président de la fédération patronale des centres d’appels, Laurent Uberti se frotte les mains : « Dans les bassins d’emploi comme Toul, Saint-Etienne, Calais, Pau, Sochaux et toutes les villes secondaires où se développent les centres d’appels, on va recruter des gens et cet accord nous permettra de former ceux qui ne sont pas issus du secteur. » Ce que ne dit pas celui qui est aussi patron d’Acticall, c’est qu’il tire deux fois le gros lot, en quelque sorte : à Toul, par exemple, son entreprise investit 500 000 euros seulement et surtout touche une aide d’un million d’euros de Michelin dans le cadre de son plan de « revitalisation » après la fermeture de son usine Kléber, et ensuite, l’État et les fonds mutualisés dans l’accord-cadre viennent compléter la fête en formant les smicardes embauchées par Acticall !


On le voit, en omettant complètement les conditions de travail et les salaires dans les centres d’appels et en se contentant de subventionner des formations, le plan gouvernemental demeure largement à côté de la plaque et risque, au fond, d’ajouter de la crise à la crise…


T. L.

 

(Source L'Humanité)

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